- Article initialement publié sur Heiðnir Webzine
- États-Unis
- Dungeon Synth
- Indépendant
- 17 avril 2019
On ne le répètera jamais assez, les Américains ont au moins un mérite, celui de proposer la scène dungeon synth la plus qualitative, et de très loin la plus active. Le fait d’être honoré du second titre ici présent n’est pas nécessairement un gage de qualité, mais il permet au moins de découvrir un certain nombre d’artistes intrigants tous les mois. Ce fut le cas pour le mois d’avril, avec la sortie du premier EP de Serpent’s Isle. Un nouveau-né parmi d’autres me direz-vous, mais non, car l’artiste a plus d’un artifice dans sa besace pour livrer à son public un dungeon synth à la fois poétique et respectueux des codes originels.
Autant annoncer la couleur d’emblée, Tales of Frigid Waters est un album qui a beaucoup de charme. Assez court malgré onze titres (seulement trois dépassent les deux minutes), l’EP de Serpent’s Isle ravira les adeptes de dungeon synth aux sonorités sincères et lofi. Comme les thématiques le suggèrent, Tales of Frigid Waters est ce que certains aiment appeler du sea synth, bien que l’on puisse aisément remettre en question l’intérêt d’une catégorisation poussée à l’extrême. Toujours est-il que l’on s’imagine assez bien au sommet de hautes falaises de calcaire, contemplant l’horizon en profitant d’un léger vent iodé.
Les samples ne sont pas étrangers au succès de Serpent’s Tale. On a beau dire, le bruit des vagues et du vent en arrière plan, ça apporte un petit quelque chose pour sublimer les sonorités électroniques. Ces dernières sont d’ailleurs assez brutes pour ainsi dire, sans que cela soit péjoratif le moins du monde, bien au contraire. Bien que beaucoup ait tendance à l’oublier, le dungeon synth au sens strict entend proposer à ses auditeurs des sonorités simples, imparfaites voire primitives. Très loin, donc, de la grosse majorités de la scène actuelle, composée d’artistes proposant de la musique orchestrale en vendant la chose comme s’il s’agissait de dungeon synth.
Il est donc très agréable d’avoir droit à ce genre d’albums résolument old school, et la scène américaine est de toute manière la meilleure pour ces joyeusetés électroniques qui sentent bon le synthétiseur des années 1990. Au rayon des satisfactions de l’EP, “Rushing Tides – Foreign Waters Ahead” se pose comme le titre le plus réussi de l’album, et surtout parce qu’il affiche la durée la plus conséquente. Pour ce qui est du reste, aucun titre n’est réellement en dessous des autres, même si les titres de moins d’une minute se montrent frustrants malgré de bonnes mélodies. Faire durer les choses est toujours très important, à retenir peut-être pour la prochaine fois. Mais en tout cas, on signe des deux mains.
Depuis le début de l’année, on avait un peu de mal à trouver des sorties marquantes en dungeon synth traditionnel, malgré quelques bonnes surprises çà et là. Serpent’s Isle a rétabli les choses en se montrant à la fois dépaysant et touchant. Tales of Frigid Waters a déjà son petit succès auprès de la communauté, et quelque chose nous dit qu’un sortie cassette ne devrait pas tarder à venir chez l’un des gros labels américains, ce qui serait amplement mérité.