- Article initialement publié sur le Heiðnir Webzine
- France
- Post Black Metal
- Les Acteurs de l'Ombre Productions
- 18 août 2016
Après la réédition de deux EP de Wildernessking, une deuxième sortie verra le jour cet été chez Emanations, la division du label Les Acteurs de l’Ombre Productions. Il s’agit d’un album split qui est le fruit de l’astucieuse collaboration de trois groupes français somme toute assez jeunes, In Cauda Venenum, Heir et Spectrale. Ces derniers pratiquent un black metal aux influences post-rock assez prononcées, et le curieux projet sera disponible dès la fin du mois d’août.
La structure du split captera facilement votre attention dans la mesure où le nombre de titres laissés à chaque formation est quelque peu surprenant, du moins au début. En effet, si Heir et Spectrale ont chacun apporté trois pierres à l’édifice, In Cauda Venenum, en revanche, ne se voit attribuer qu’un seul morceau, et pour cause. Il s’agit là d’une interprétation du thème de Laura Palmer, provenant de la bande originale de Twin Peaks. Ces quelques subtilités, couplées à un album ouvertement atmosphérique et, à certains égards, acoustique, nous offrent une production douée d’une fraîcheur incomparable. Si chaque formation a une approche différente de la musique qui est présente sur ce split, il convient de tout traiter dans son ensemble, car les groupes sont très complémentaires, et il serait de toute manière fort réducteur de qualifier leurs performances respectives de manière individuelle.
Si vous connaissez un minimum ces trois formations, vous n’êtes pas sans savoir que leur musique se situe plus ou moins dans le même registre de post-black édulcoré. Il ne s’agit pas là d’une critique, ce sous-genre est une bouffée d’air frais bienvenue, alors que la course à la violence et à l’occulte fait rage. Simplement, sachez que le puriste convaincu que vous êtes pourrait ne pas apprécier cet album à sa juste valeur. Néanmoins, si vous avez un penchant prononcé pour les évolutions atmosphériques du black metal, vous saurez vous laisser porter par le voyage presque onirique proposé par les trois formations françaises. Même si la musique de Heir semble plus sombre que celle de Spectrale, ou encore si le thème de Laura Palmer ne vous paraît pas indispensable, voire superflu, vous avez tout faux. Chaque morceau est comme l’engrenage d’une efficace mécanique. Il est vrai que l’on passe aisément d’un titre acoustique à un titre plus brutal, mais cela fait finalement partie de la richesse de ce split. Vous êtes en droit de penser qu’un titre tel que « Al Ashfar » ne saurait avoir sa place sur un album de black metal digne de ce nom, mais le fait est que cette variété est justement la force de l’album.
Il subsiste dans cet album un mariage admirable entre les douces interrogations et les sombres velléités qui sont propres au black metal. Le travail fourni par les trois formations est tel que cet album split fait office de production révolutionnaire au sein d’un genre musical qui peut se montrer très systématisé. On appréciera la conception qui a presque été réalisée sans faute, car nous avons malgré tout devant nous des formations qui ne sont actives que depuis peu. On distingue, déjà, un certain savoir-faire dans leur musique. Cela n’est sans doute pas étranger, pour ce qui est de Spectrale, à la présence de Jeff Grimal (The Great Old Ones), qui n’en est pas à sa première prouesse en la matière. In Cauda Venenum nous avait déjà gratifié d’un excellent album l’année dernière, la formation poursuit ainsi, tout comme Heir, dans la lignée de sa première démo (d’où proviennent, d’ailleurs, les titres du split), sa progression et son ascension des échelons au sein de la scène black française.
L’album split verra le jour sous la forme d’un CD tiré à 600 exemplaires le 18 août prochain et contentera, non sans mérite, les adeptes d’un black d’un genre nouveau, à la fois doux et contemplatif, mais pas exempt d’une bonne dose de fougue qui s’adapte parfaitement au travail acoustique qui a été réalisé pour sa conception. Il s’agit là d’un split qui pourrait rapidement devenir indispensable à toute personne se revendiquant un minimum sympathisant de la vaste secte que l’on pourrait associer au post-black. Déjà un classique.