Squire – Heavy Armour and Shield

by Secluded Copyist

Par dungeon synth médiéval, on entend souvent dungeon synth à thématiques médiévalisantes. Il est d’avis à votre narrateur, et sans doute à d’autres, que le dungeon synth stricto sensu est obligatoirement médiéval, mais ce fantasme ne correspond guère à la réalité. Au cœur d’une myriade de projets orchestraux fort poétiques, on trouve quelques projets à la démarche plus confidentielle et aux sonorités plus rustiques. Ces projets véhiculent une idée du dungeon synth médiéval authentique et grisante. Ils viennent d’accueillir dans leurs rangs un nouvel artiste qu’il faudra dès lors suivre de près. Venu des froides forêts de Finlande, Squire renoue avec une tradition séduisante qui semblait perdue.

Heavy Armour and Shield ne donne pas particulièrement envie par sa pochette, peu engageante et privée de ses couleurs. En revanche, son titre, délicieusement stéréotypé, dessine une moue intéressée sur les visages. Un projet dont le nom est Squire et dont la première sortie s’intitule Heavy Armour and Shield ne peut qu’entraîner son auditoire sur les vastes sentiers passéistes du dungeon synth médiéval. Cette première sortie s’ouvre sur les cuivres saisissants de « Opening of the Gates ». L’assemblage installe d’emblée une atmosphère un brin épique, de façon très agréable. On sait à quel point le registre épique peut se muer en piège dans le dungeon synth, Squire ne tombe pas dedans. Au contraire, l’entièreté de Heavy Armour and Shield semble mue par une justesse admirable.

Les cuivres, base absolue du dungeon synth médiéval, sont les compagnons de l’auditeur du début à la fin de l’album. C’est notamment le cas sur l’excellent « Herttua Kultakypärä », qui se permet même quelques envolées dansantes du plus bel effet. La tracklist semble pauvre en apparence, on évidemment loin des Canterbury Tales de Chaucerian Myth, mais Squire est parvenu à travailler chaque titre de façon à lui donner une identité propre, et sans jamais mettre en péril l’homogénéité de l’album. Une prouesse dans ce registre. On a de l’épique avec « Opening of the Gates » et « The Retinue », du sombre et lancinant avec « An Old Enemy », et même de l’aérien avec « Bloodstained Surcoats ».

Sur le plan technique, l’artiste maîtrise suffisamment son matériel pour donner de l’épaisseur à sa musique sans jamais menacer son authenticité. Malgré la multiplication des mélodies, plages et sonorités, on demeure du début à la fin face à un dungeon synth intimiste et sincère. Une manière on ne peut plus respectable de conter la richesse d’une époque qui inspire tant. Squire a compris tout cela à merveille et met au monde une première sortie très réussie. Le projet finlandais marche sur les pas des Utred, Sagenhaft et autres Oldenhelm, excusez du peu. Regardez-moi dans les yeux et dites-moi que « Lance Formation » ne ressemble pas à Utred période Citadel. On lui souhaite de tout cœur de parvenir au même rayonnement et à la même notoriété.

Malgré la relative modestie de son format, Heavy Armour and Shield a beaucoup de choses à raconter. Il s’adresse à tous les amoureux du dungeon synth sans exception, histoire que chacun sache ce à quoi ressemble le travail d’un artiste désireux d’évoluer dans un registre traditionnel, inspiré par des rêves faits de donjons, de vieilles chapelle et d’épaisses murailles. Il est émouvant de voir des artistes continuer à sortir ce genre d’albums, et l’on espère à ce titre que Squire ne va pas s’arrêter de sitôt.

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