- Norvège
- Black Metal
- Duplicate Records
- 24 mars 2023
Depuis la naissance, et surtout le déclin, de la sacro-sainte scène norvégienne des années 90, on ne compte pas les groupes et projets se réclamant de son héritage. En 2023, les espoirs sont plus minces que jamais de voir renaître une scène toujours plus ou moins effervescente mais bien loin de ses antiques et augustes standards. Ainsi, il faut pouvoir faire le tri entre les groupes ayant l’étendard norvégien pour seul argument, et ceux dont le travail vaut effectivement le détour. Et ça tombe bien, car le printemps a offert aux suiveurs assidus du black metal l’acte de naissance d’un projet fort mystérieux nommé Motstand.
Quiconque voudrait en savoir plus sur la nouvelle entité norvégienne se heurterait à un mur. Outre le nom du projet (résistance en français), qui donne d’ailleurs son titre à cette première sortie, on trouve fort peu d’informations sur la toile. Tout juste apprend-on de la part du label à l’origine de la production, Duplicate Records, que ladite sortie a été travaillée pour la première fois en 2012, avant que les chants ne soient enregistrés en 2020. On se sait jamais vraiment quel crédit apporter à ce genre de déclaration, mais soit. Maintenant que nous avons, tant bien que mal, contextualisé la sortie de Motstand, il est temps de s’intéresser à son contenu. Et la première sortie du projet norvégien a beaucoup de choses à offrir.
Cinq titres pour une demi-heure de réjouissances, ça laisse un peu de temps pour faire entendre ce que l’on a à dire. Avec ses atmosphères froides et sa production relativement raw, Motstand indique d’emblée que son black metal est fait du même bois que celui qui a fanatisé les foules durant sa seconde vague. Dès le premier titre, « Illskrik ved høynattstid », on constate que la place accordée au riffing est de premier ordre. L’ensemble est assez rapide et offre beaucoup de consistance, grâce à des riffs très accrocheurs. Un peu plus et l’on aurait presque l’impression d’avoir les premiers albums de Taake dans les oreilles. Quant à eux, les chants sont clairement mis en avant, quitte à supplanter quelques mélodies au passage, ce qui n’est pas déplaisant pour parachever le sentiment d’ensorcèlement qui transpire de chacun des titres.
Si l’on devait se montrer tatillon, on affirmerait que l’album a tendance à s’essouffler au fil des titres. L’ambiance demeure intacte, mais les riffs sont peut-être un poil moins grisants dans la deuxième moitié de Motstand — encore que « Skogens fantasmagori », par exemple, compense cela par une rythmique diaboliquement efficace. Finalement, le format de cette première sortie semble très approprié, c’est-à-dire suffisamment long pour apprécier le travail sur le climat et la production, sans pour autant lasser l’auditeur, la faute à des titres qui peuvent se montrer peu hétérogènes. Grâce à ses riffs et au son de guitare qu’il est parvenu à créer, Motstand fait une arrivée remarquée sur le scène black metal.
La première sortie du projet norvégien s’achève sur les accents plus aériens — toutes proportions gardées — de « Parnassos’ tind (i skyggen av solen) », avec des chœurs masculins et des riffs plus poignants qu’agressifs, contrairement à ce qui fut la tendance jusqu’alors. On est définitivement surpris par la qualité et la consistance de ce premier album, et Motstand fait d’emblée office de projet à suivre, pourvu qu’il ne s’arrête pas en si bon chemin. Ne vous y trompez pas, la Norvège a encore de très belles choses à offrir.