Häxan – Tales of Aphotic Wood & Hidden Vales

by Secluded Copyist

De l’eau a coulé sous les ponts depuis les débuts de l’artiste situé derrière Häxan, son affection pour le dark ambient ritualiste ayant lentement mais sûrement laissé place à une envie de composer quelque chose de bien plus typée dark folk, au rythme de son appétence pour cette branche tout aussi mystique de la musique. Après avoir multiplié les sorties et les labels (Depressive Illusions, High Cathedral Records), l’artiste français a passé un cap avec la sortie de Tales of Aphotic Wood & Hidden Vales, produit à l’aide d’une très belle édition digipack chez Transcendance Records. D’ailleurs, si ce cap a été passé quant à la collaboration avec le acteurs du milieu, c’est sans doute parce qu’il a aussi été passé sur le plan de la qualité musicale…

Avec Häxan, le voyage est toujours lent et profitable. L’univers de l’artiste sent bon le pétrichor et la forêt de novembre, c’est un retour à la terre et aux croyances d’antan. On apprécie grandement cette ambiance automnale, apaisante et réconfortante, qui ne s’éloigne toutefois jamais de ses velléités mystiques. Si ces caractéristiques avaient pu être touchées du doigt sur les précédentes sorties de l’artiste, on plonge cette fois-ci à pieds joints dans la flaque d’eau. Tales of Aphotic Wood & Hidden Vales est, par son importance et son contenu, la sortie qui reflète sans doute le mieux la véritable inclination qu’a l’artiste pour ces ambiances authentiques et boisées. Bien que je ne goûte que peu l’aquarelle en tant que technique, il faut reconnaître à la pochette — finement réalisée par Raphaël Alriq — un certain pouvoir d’évasion. Et ça tombe bien, c’est exactement ce que l’on retient de Tales of Aphotic Wood & Hidden Vales.

Les ingrédients utilisés par Häxan dans sa quête d’errance sont à l’image de ce que l’on connaît de sa musique. Des guitares dépouillées sont régulièrement accompagnées de plages ambient diverses et variées, voire de samples au rôle bien précis. Je pense ainsi à ceux présents sur « Father, Son and Earl of Doubt », directement tirée de la version originale du Septième Sceau d’Ingmar Bergman, la musicalité de la langue suédoise se prêtant particulièrement à ce genre d’atmosphère. Ce choix n’est d’ailleurs pas sans rappeler un autre projet de l’artiste, Sabbats of Saerwyndr. On se souvient par exemple des incantations prononcées dans la même langue sur « Among the World’s Roots », tiré de l’album Ov Cults. Pour ce qui est du reste, il faut reconnaître l’homogénéité de l’ensemble. L’auditeur fait un premier pas dans l’album au son de « Veiled (Harkee) », titre introductif garni de plages ambient et du son si enivrant de la pluie, qui ne quittera d’ailleurs jamais complètement l’album.

C’est à partir de « Coniferous Vault » que la dimension dark folk du projet se dévoile réellement, avec ses mélodies délicates et répétitives, elles-mêmes soutenues par de lointains chants féminins. On apprécie particulièrement le dernier tiers du titre, avec ses mélodies pleines d’émotion. « Enshrouded Woods (The Ravishing Mist) » suit grossièrement le même cheminement pour le même résultat, avec cependant des sonorités un poil plus éclatantes. Parmi la liste des titres qui donnent corps à Tales of Aphotic Wood & Hidden Vales, il en est deux dont la durée les rend de facto plus mineur que les autres, mais dont les mélodies sont très prenantes, par leur sincérité et leur rondeur, en l’occurrence « Numinous Ways » et « Blind Visions (Eerie Dreams) ». Deux petits interludes très agréables au beau milieu de titres plus riches. La grande force de cet album réside d’ailleurs dans la complémentarité de ses titres. On a beau chercher, il est bien difficile d’en trouver un qui soit réellement en dessous des autres, si bien que les dix odes à la forêt qui composent Tales of Aphotic Wood & Hidden Vales font de lui un album qui stimule inlassablement nos envies d’exode, de dépaysement et d’isolation.

Comme le suggère le soin apporté à la sortie physique accompagnant celle de Tales of Aphotic Wood & Hidden Vales, Häxan bascule effectivement dans une autre dimension avec la sortie de son premier album longue-durée. Avec le projet français, il n’est désormais plus question d’évoquer, de figurer la forêt, il est venu le temps de la vivre, de la parcourir, de l’humer, de la ressentir, de s’imprégner de ses légendes et de ses mythes. Un vrai moment d’évasion.

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