Gevurah – Gehinnom

by Secluded Copyist

Après avoir secoué son monde en 2016 à l’occasion de la sortie de Hallelujah!, le duo canadien Gevurah a refait surface au cœur de l’automne avec un deuxième album longue durée dans sa besace. Il s’agit du sulfureux Gehinnom, nom hébreu de la Géhenne, lieu associé à la souffrance et à la mort dans les principaux cultes monothéistes. Réutilisant la recette qui a fait son succès ces dernières années, Gevurah revient avec la ferme intention de mettre le monde à genoux devant la nature toujours plus écrasante de sa musique. Le pari semble réussi haut la main, tant l’album regorge de passages qui impressionnent par leur dimension.

L’écrin étant souvent d’une importance capitale dans la manière dont les albums nous parviennent, il convient d’avoir quelques mots pour la pochette de ce Gehinnom. Cette dernière a été réalisée par l’immense peintre russe Denis Forkas Kostromitin, qui a notamment illustré un album d’un certain groupe nommé Akhlys. Plein d’élégance et d’à-propos, l’artwork se mue en portail de choix pour accueillir un auditoire charmé vers la musique de Gevurah. Et cet auditoire ne sera pas déçu. Après un court titre éponyme au cours duquel une guitare acoustique donne un premier aperçu du décor concocté par le duo, toute sa hargne peut s’exprimer sur un « At the Orient of Eden » qui ravage tout sur son passage.

On remarque d’emblée que le son fait preuve d’une richesse et d’une densité qui ne sont pas étrangères à l’aura que dégage l’album. Il se passe beaucoup de choses sur la grande majorité des titres de Gehinnom. On mentionnera évidemment la batterie, qui saisit à la gorge dès les premières vociférations du deuxième titre, mais la place laissée aux chants y est également pour beaucoup. Ce chant rageur, courroucé achève de dresser au-dessus de l’auditeur cette chape maléfique et inquiétante qui n’a de cesse de captiver son monde au fil de l’album. Tout juste « Lv.16:22 », en référence au Lévitique 16:22, viendra calmer les cieux avant l’arrivée des deux derniers titres de l’album.

Le paysage sonore saturé – mais à la production très propre malgré tout – fascine autant qu’il tourmente. Le chaos demeure mesuré et permet d’apprécier à sa juste valeur chaque élément qui donne corps au marasme que représente Gehinnom. Outre le titre introductif et le titre « Lv.16:22 » – qui fait office d’interlude –, chaque titre se montre complet et secoue son auditoire avec vigueur et conviction. Gevurah se paie même le luxe de faire mourir son album sur le très consistant « Gloria in Excelsis Deo, et Ira ad Homines in Terra ». Représentant à lui seul un tiers de l’album ou presque, ce titre final représente tout ce qui fait la force de la deuxième création des Canadiens.

Sans remettre en question le pouvoir d’emprise des autres titres de l’album, « Gloria in Excelsis Deo, et Ira ad Homines in Terra » se démarque par son épaisseur et fait montre d’une puissance encore plus importante que celle de « At the Orient of Eden ». Un titre à l’image du disque dont il est issu. Un titre riche, entêtant et inquiétant, mais pas dénué d’une certaine beauté, le genre de beauté qui se dégage parfois des créations de black metal orthodoxe les plus passionnées. Trois quarts d’heure durant, Gevurah assène les coups et se retire sans demander son reste. Après tout, que dire de plus ?

Implacable, tel est le mot qui nous vient finalement à l’esprit au moment de dresser un bilan du deuxième album du duo canadien. Avec un savant mélange d’atmosphères oppressantes, de rythmiques dévastatrices et de riffs de guitare brutaux à souhait, Gevurah a créé un album captivant et menaçant qui ne manque pas de marquer cette fin d’année 2022. Gehinnom remplit parfaitement son rôle et propulse dès lors ses géniteurs sur le devant d’une scène qu’il serait risqué de ne pas surveiller du coin de l’œil.

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